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M. ou Mme Untel était votre confident, votre ami, du moins, c’est ce que vous croyiez. Et pourtant, vous n’avez plus de nouvelles. Vous ne savez même pas pourquoi… Cette situation survient plus souvent que l’on ne le pense, tant sur le plan personnel que professionnel. Il y a toutes sortes de raisons qui poussent quelqu’un à s’éloigner sans explications. Mais, la plupart du temps, il y a, à la base, un incident qui entraîne une nouvelle perception de l’autre et la naissance (ou l’amplification) d’un sentiment négatif auto-alimenté. Or, l’autre pourrait être tenté d’entacher votre réputation… Évidemment, j’emploie le masculin pour simplifier le texte, mais ce comportement d’évitement et de médisance n’a pas de sexe.
Causes et conséquences
Tout d’abord, vous ne pouvez contrôler ce que les autres pensent de vous. Qui plus est, vous ne pouvez pas, non plus, les empêcher de vous envier, de vous jalouser, de vous percevoir comme une menace ou de s’imaginer des scénarios catastrophes qui n’ont rien à voir avec la réalité. Cela leur appartient. Or, dans le milieu du travail, j’ai vu bien souvent des professionnels, hommes et femmes, qui, parce qu’ils avaient interprété négativement les comportements et les propos d’un collègue, refusaient désormais de lui adresser la parole. Ils l’ignoraient. Parfois même, ils évitaient sa compagnie. Ils s’assuraient qu’il n’était pas invité à dîner avec un sous-groupe de collègues. Et, surtout, ils répandaient leur venin sur cet individu, dans son dos, sans jamais avoir une discussion franche avec lui. Le plus surprenant, c’est que, ces individus qui s’éloignent sans explications, sont les premiers à crier à la trahison, au « bitchage » et à la médisance!
Un psy m’avait dit un jour que l’on accuse les autres des défauts que l’on a soi-même et que l’on ne veut pas reconnaître en soi. Bien entendu, ne voulant pas être seul à détester quelqu’un, ces collègues se cherchent des alliés qui pensent comme eux. Ils tentent aussi de convaincre leurs pairs de la mauvaise foi, de l’opportunisme déplacé ou de la méchanceté de leur cible.
Que faire?
Tout d’abord, si vous êtes victime de diffamation et d’atteinte à la réputation au travail de la part d’un collègue, prévenez votre patron de la situation et mentionnez-lui que vous souhaitez avoir une conversation avec le collègue concerné dans les plus brefs délais. Informez-le des propos que vous comptez tenir, de l’approche que vous allez utiliser et de votre objectif : viser une amélioration. L’idée est de prévenir les dégâts et dommages collatéraux.
Surtout, ne faites pas le tour de votre équipe de travail pour vous plaindre de votre collègue sinon vous entrez dans le même jeu que lui et vous vous livrez alors à la même médisance. Je sais, lorsque l’on prend conscience d’une attaque, le besoin de verbaliser l’émotion et de s’entourer d’alliés est important. Mais, de grâce, verbaliser à quelqu’un qui est extérieur à vos collègues, qui est digne de confiance et qui peut réellement vous écouter, vous aider et vous conseiller : un psy, un coach, un mentor.
Timing
De plus, choisissez un bon moment pour aborder votre collègue. S’il est débordé ou en colère contre un client, il ne sera pas réceptif. S’il doit aller chercher les enfants à l’école dans cinq minutes, il n’aura pas d’écoute. Qui plus est, assurez-vous d’être vous-même en forme. Le moment parfait n’existe pas. C’est certain que la conversation n’aura rien d’agréable. Alors, inutile de la reporter continuellement. Plus vous attendez, plus drainez votre énergie. Rappelez-vous que cette discussion sert à entamer un processus de gestion des relations de travail et à limiter les impacts négatifs de la diffamation.
Ne tournez pas autour du pot. Abordez votre collègue le plus simplement possible. Mentionnez-lui que vous avez été mis au courant de propos qu’il aurait tenu contre vous. Informez-le que vous êtes désolé qu’il ait une perception erronée de vous et que vous apprécieriez qu’à l’avenir il prenne le temps de valider ses impressions directement avec vous. La relation de travail en sera facilitée.
Quoi dire?
S’il hausse le ton, indiquez-lui que vous entendez ce qu’il dit et que la discussion ne peut être constructive que si elle se mène sur un ton calme et posé. Parlez avec une voix ferme mais sereine. Maintenez un ton normal et un débit un peu plus lent que d’habitude. Soutenez son regard. Respirez. Détendez-vous le plus possible et demeurez totalement présent dans l’instant. Parlez au « Je » :
– J’entends ce que tu me dis.
– J’entends ton propos.
– Je suis en désaccord avec toi.
– Je te demande de me parler sur un ton calme.
Gestion des émotions
Rappelez-vous que son émotion lui appartient et la vôtre vous appartient aussi. Restez calme et serein. Vous n’avez de réelle influence que sur votre réaction et votre état. Et, ce que vous visez en bout de ligne, c’est qu’il cesse de tenir des propos diffamatoires et vexatoires à votre endroit. C’est la demande qu’il vous faudra formuler le plus simplement et le plus clairement possible, en parlant au « Je » et en évitant les formulaires négatives. S’il affirme qu’il n’a pas parlé contre vous, vous pouvez alors lui répondre que vous êtes heureux d’avoir discuté de cette perception directement avec lui. Vous lui donnez ainsi un « modèle » de comportement approprié : valider une perception avec la personne concernée.
Si plusieurs collègues vous ont fait part de propos négatifs de sa part, vous pouvez l’inviter à communiquer plus clairement à l’avenir puisque vous avez reçu la visite de collègues vous informant de propos inappropriés. Ajoutez que vous êtes satisfait d’avoir éclairci ce point avec lui et souhaitez-lui qu’à l’avenir la communication soit plus sereine.
Éviter la joute oratoire
Ne vous éternisez pas dans son bureau. Vous n’êtes pas là pour jouer au ping pong. L’idée n’est pas de se lancer dans une joute oratoire, l’idée est de passer un message clair. Quand une confrontation perdure, elle ne donne jamais rien de bon parce que, sous le coup de l’émotion, les propos sont déformés et mal reçus. Les répliques sont acerbes. Les dégâts sont certains. Rappelez-vous que l’on réagit toujours plus fort quand on sait que l’on est dans le tort. Le collègue qui a parlé dans votre dos et que vous confrontez risque donc de sur-réagir.
Ne faites donc pas exprès de prêter flan en écoutant toutes ses récriminations et son venin. Il risque fort de chercher à vous faire sentir coupable de son propre état! Il va chercher à se justifier pour ne pas perdre la face. Ça ne sert à rien d’entrer dans ce jeu. Rappelez-lui que vous êtes désolé que sa perception soit si différente et vous lui demandez, encore, une fois, qu’à l’avenir, il valide avec vous ses perceptions à votre sujet. Ne portez pas d’accusation, ne tombez pas dans le jugement ou dans l’interprétation de son comportement. Ce serait du chantage affectif.
Informer votre patron
Dès que vous sortez du bureau, indiquez à votre patron que vous avez eu la conversation prévue. Pourquoi ne vous ai-je pas dit de demander à votre patron d’intervenir à votre place? Parce que vous le positionneriez, lui, comme vous-même, dans une situation de triangulation : vous êtes la victime d’un bourreau et il devient le sauveur. Or, c’est à vous à gérer vos relations, pas à votre patron. Par contre, votre patron doit s’assurer que le climat de travail est sain et serein. C’est pourquoi vous l’informez de la situation et de votre démarche afin qu’il puisse vous conseiller, au besoin, et adapter lui-même ses interventions s’il le juge nécessaire. Rappelez-vous que peu de patrons sont réellement à l’aise et outillés pour gérer les conflits. Pour paraphraser le titre d’un livre de Brian Desroches, ne prenez pas votre patron pour votre mère! Mais assurez vos arrières et affichez votre maturité relationnelle.
Ressourcement
Après votre discussion, même si vous êtes satisfait de la façon dont vous vous êtes exprimé, vous risquez d’avoir des émotions à gérer. Vous pouvez ressentir de la colère, vous sentir vidé, stressé, écoeuré. C’est normal. Assurez-vous donc d’avoir un moment tranquille pour vous ressourcer. Prenez une marche, faites des exercices de respiration ou de méditation. Accordez-vous une récompense pour avoir osé agir au lieu de réagir.
Consolidation
Prenez le temps, avec les collègues dont vous êtes plus proche, de leur suggérer, lorsque quelqu’un vient leur raconter de mesquines rumeurs, de suggérer à l’interlocuteur de s’adresser à la personne concernée et non à des tiers afin de maintenir un climat de travail sain. Quand tout le monde y met du sien, il est possible de mettre fin à la «radio corridor».
Conclusion
Malgré toutes vos bonnes intentions et vos actions matures, il demeure possible de rencontrer des gens qui prennent un malin plaisir à médire, à papoter, à jacasser contre les autres. Mais il leur sera plus difficile de vous atteindre si vous ne tombez pas dans le même bateau et si vous intervenez de façon courtoise et ferme. Les «médiseurs» ont besoin de spectateurs pour s’épanouir. Quand l’équipe est solide, communique clairement et correctement, le terreau n’est pas fertile à la diffamation.
Suggestion de lecture : Relations sous emprise
Annabelle Boyer, CRHA, M.Sc. Administration, synergologue, génagogue
Rétroliens/Pings